Priscilla Occhipinti: Première femme Maître Distillatrice de grappa en Toscane

Priscilla Occhipinti: Première femme Maître Distillatrice de grappa en Toscane

Devenir la première femme maître distillatrice de Nannoni Grappa n’était pas l’objectif de Priscilla Occhipinti. Enfant, elle voulait être médecin comme sa mère, mais une rencontre a changé le court de sa vie.

« J’ai rencontré Gioacchino Nannoni parce qu’il était un ami de mon père. Gioacchino a fondé la distillerie Nannoni  en 1973 en rachetant la distillerie Val d’Ombrone située en Toscane. A l’âge de 37 ans, il réalise alors son rêve après avoir consacré la première partie de sa vie à la fabrication et à la maintenance d’alambics en cuivre ».

« A cette époque, la Toscane produisait déjà d’excellents vins, complexes, riches en tanins et en arômes. Par exemple le Chianti, le Brunello et le Nobile. Nannoni savait que le marc (vinaccia en italien) issus de ces vins avait un énorme potentiel pour produire d’excellentes grappas. Il rêvait de de produire une « grappa de domaine », artisanale, qui reflète son terroir. Et c’est exactement ce qu’il a fait. Gioacchino a joué un rôle déterminant dans le développement et la reconnaissance de ce label. »

Priscilla Occhipinti poursuit : « Au début, Gioacchino a eu de vifs débats avec les viticulteurs, car à l’époque, en Toscane, ces derniers ne prenaient pas soin du « marc » qui avait peu de valeur à leurs yeux. Le marc était exposé aux rayons du soleil et aux intempéries, en attendant son traitement. Mais les choses ont changé par la suite. Certains ont commencé à lui faire confiance et il s’est fait de bons alliés dans des domaines viticoles fantastiques. Jusqu’à la fin de sa vie, il s’est battu pour faire reconnaître la qualité de ces « grappas de domaine », produites par de petits artisans, afin de les différencier de celles produites de manière industrielle à partir de moûts conservés ».

Exploration et passion

Priscilla explique ce qui la menée à choisir ce métier.

« Quand j’étais plus jeune, ma famille et moi organisions régulièrement des fêtes à la distillerie. Mon objectif à l’époque était de devenir médecin comme ma mère. À l’âge de 15-16 ans, j’ai commencé à venir plus souvent à la distillerie.  Gioacchino m’a alors demandé si j’avais déjà envisagé d’étudier l’œnologie : cela a toujours été son rêve de transmettre son savoir-faire, en plus de produire une grappa d’excellente qualité.

« Enfant, je me souviens de mon père, de mon grand-père et de nos amis discutant de chaque bouteille de vin à notre table. Ces discussions m’ont intriguée. Mais ce sont les nombreux échanges avec Gioacchino Nannoni sur le  vin, le marc, la distillatin et la grappa qui ont développé ma curiosité pour ce métier.  J’ai appris le français pour pouvoir étudier l’œnologie à Bordeaux. Malheureusement, je venais d’un lycée classique, ce qui a constitué une barrière pour m’inscrire dans cette filière scientifique en France. Je suis me suis donc tournée vers une université italienne pour y étudier l’œnologie. ”

Dans les traces du Maître

« J’ai commencé à distiller avec Giaocchino, et plus tard il m’a proposé de reprendre la distillerie. Ce que j’ai fait, mais il a continué à m’épauler jusqu’à son décès. Cela fait maintenant 25 ans que je distille, et je suis très heureuse que nous ayons pu pérenniser son œuvre. Son enseignement a été extrêmement précieux. Il avait construit son alambic  de ses propres mains, il m’a appris cette alchimie de la distillation.  J’ai passé beaucoup de temps avec lui à étudier fonctionnement de l’alambic, à le réparer, à le modifier, à écouter son ronronnement, à trouver les bons réglages. J’ai été frappée par sa recherche maniaque de la perfection. »

Quand Giaocchino Nannoni a débuté, il produisait de la grappa « di factoria » à façon, un peu comme un distillateur ambulant. Les producteurs livraient leur marc pour le faire distiller et reprenaient leur grappa pour la commercialiser. Aujourd’hui encore, 90% des marcs sont distillés à façon, par exemple pour des grands domaines tels que Montevertine, Ornellaia, Ferragamo, Altesino , … Les 10% restant sont des marcs achetés et commercialisés sous la marque de la distillerie.

Tracer sa propre voie

« Nous travaillons essentiellement à partir de marc frais, raison pour laquelle nous ne distillons plus après le 15 novembre. On pourrait travailler avec des marcs conservés sous atmosphère d’azote ou congelés mais cela change les profils aromatiques. Je ne travaille qu’avec du « vinaccia fresca », et je choisis chaque année avec qui je travaille, en fonction du temps dont je dispose car je suis la seule personne à distiller. J’établis mon programme. Si par exemple, un producteur dispose de 3 types de marc différent, je peux lui dire que je ne prendrais que deux types sur les trois cette année. Le marc est un produit fort fragile, je dois le distiller aussi rapidement que possible pour garder toute ses propriétés qualitatives. »

« J’ai trois alambics, à vapeur directe ou indirecte, à fonctionnement discontinu, d’une capacité de 1.500 à 2.000 kg de marc. Ils fonctionnent à pression normale. Je fais les coupes des têtes et queues manuellement. Il y a de légères différences entre les 3 appareils, et je réserve l’un ou l’autre en fonction de la charge en liquide (vin) du marc. L’un travaille mieux pour des marcs très « humides », un autre opère mieux sur des marcs plus « secs ». Mais en sortie, cela donne peu de différence.  En moyenne, je sors 100 à 150 l d’alcool à 42% ABV pour 1.000 kg de marc. »

Cette femme étonnante n’est pas à court d’idées. Elle a élargi son répertoire de la grappa et du brandy au gin, au vermouth, au bitter et au whisky. Il y a 7 ans, elle s’est offert un petit alambic de 200 litres. « Mon maître m’avait enseigné la distillation de la grappa et du brandy, mais personne ne m’avait enseigné l’utilisation des plantes pour l’élaboration de gin, amaro, bitter…. Je me suis donc prise au jeu. Mon mari est passionné de botanique et il m’a montré de nombreuses plantes poussant naturellement dans les environs de la distillerie. J’ai donc créé cette première gamme de gin appelée « GinGillo », ce qui signifie un petit jeu. Car pour moi, c’était un jeu ».

Elle poursuit : « Puis de nombreuses personnes m’ont demandé de leur créer leur gin : j’ai reçu des demandes d’Italie, des Iles Canaries et de la France.  Je suis ainsi passée de mon métier de distillatrice à celui de  créatrice de spiritueux. J’ai ainsi développé un bitter pendant le covid, période pendant laquelle je ne savais pas quoi faire. Je viens de créer un Vermouth., et récemment, j’ai sorti mes premières bouteilles de whisky. »

Le Costellazioni – GinGillo (GinGillo Constellations) est une série de 12 gins, un pour chaque signe du zodiaque. Nous écrirons un petit article pour approfondir ce projet, que j’ai trouvé bien pensé.

En Juillet, la distillerie fêtera son cinquantième anniversaire! Joyeux Anniversaire.

Les grappas et gins de Nannoni ont reçu des nombreuses récompenses au Spirits Selection by Concours Mondial de Bruxelles. Découvrez ce que le jury écrit à propos de cette Grappa di Brunello Riserva 5 anni 2020.

Thierry Heins

Grappa di Brunello Riserva 5 anni 2020 – Gold Medal 2020

Appearance: Beautiful golden color.

Nose: Good, intense nose with dried fruits and sweet spice notes. Fresh feeling with a pleasant mineral touch, leather, hay and straw. Lively, charming… Very promising!

Palate: Upfront and clear mouthfeel, with nicely restrained wood influence. Very nice complexity and structure. Notes of dried fruits, peach and sweet cedar wood. Some smoky hints. Very enjoyable.

Overall: A very well-crafted grappa, excellently assembled. Beautifully balanced, with a complex and harmonious structure. Rich and warm, with well-integrated alcohol and wood. Very nice!

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